Ces derniers temps, le spectacle vivant, malgré sa vaillance subit des épreuves dignes des plus grandes tragédies. Face aux enjeux politiques, environnementaux et technologiques, l’art paraît bien souvent relégué à l’arrière-plan d’une époque instable, tourmentée et inquiète.
Aujourd’hui, l’économie mutile ce qui nous tient debout. Partout, on ferme, on réduit, on reporte. Partout, on saborde une architecture culturelle populaire que des générations ont patiemment édifiée avec passion et fierté. Nous étions la nation qui avait osé croire qu’il fallait que chaque territoire, chaque commune, chaque quartier ait son théâtre, son centre culturel, sa médiathèque, son conservatoire. Nous avons fait le choix collectif, de l’ambition de la culture pour tous ! Elle n’est pas moins précieuse que la justice, la santé, ou l’école : elle est leur sœur. Elle est ce qui permet à une démocratie de penser et de se réinventer.
La France est donc riche d’un paysage artistique inestimable, dont l’activité et l’éclat des productions d’hier contrastent douloureusement avec la sobriété et les renoncements d’aujourd’hui. Les déséquilibres s’aggravent et les subventions résiduelles mettent en péril des institutions, des festivals, des compagnies, des lieux de création, des ateliers de constructions…
Le recours au fonds de réserve, utilisé comme une rustine technocratique pour préserver un équilibre de façade, ne saurait masquer plus longtemps les effets durables des baisses des subventions des collectivités, aggravés par l’inflation constante des charges de fonctionnement.
La politique culturelle de demain, si elle veut tenir ses promesses de mieux produire, mieux diffuser, devra aussi savoir mieux entendre notre écosystème. Il ne suffit pas de briser les cadres : encore faut-il bâtir les formes nouvelles capables de les remplacer. D’autres imaginaires appellent d’autres moyens, qui ne sauraient obéir aux règles de l’uberisations et de l’algorithmes.
Les programmes des saisons artistiques, conjurent tant bien que mal la pénurie, et en coulisse les équipes s’épuisent à sauver les apparences pour maintenir de nombreux levers de rideaux. Le système D est devenu le dernier carburant d’un moteur que l’on feint de croire encore puissant. L’été culturel en camping c’est bien, mais c’est prendre avec une certaine légèreté les défis auxquels nos métiers sont confrontés. Notre navire sombre et l’on s’interroge sur la traçabilité du bois des chaloupes. Tenir bon ne suffit plus !
Car vivre de son art ne peut se réduire à survivre d’une création à l’autre, à saluer son public avec le sourire de ceux qui savent que demain est déjà compromis. Autour de nous, les cercles de nos collaborateurs se restreignent, les métiers disparaissent, les compétences s’effacent, emportées par le courant d’une société résignée.
En 2026, pourra-t-on encore garantir aux comédiens, la présence d’un costumier, d’un scénographe, d’un créateur lumière ? Ou faudra-t-il, à force de coupes, faire du théâtre sans auteur et sans scène ?
À mesure que l’intelligence artificielle colonise nos imaginaires, c’est toute l’intelligence humaine, sensible, poétique, et créative, qu’il nous faut défendre et valoriser pour dessiner l’avenir d’une société.
La force de l’UDS réside dans notre capacité collective à nourrir l’espoir face à une situation qui peut sembler en manquer.
Nous n’avons pas seulement besoin d’un soutien économique : nous avons besoin d’un engagement politique. Car ce que nous finançons, ce n’est pas le superflu : c’est le socle de ce qui nous rend humains. La scène, reste notre derniers lieux où l’on apprend à penser et rêver ensemble face à la brutalité du monde.
Nous sommes les héritiers de Molière, d’Hugo, de Camus, de Vilar et à l’occasion du festival d’Avignon 2025, l’UDS refusent de céder au fatalisme et appelle solennellement à soutenir la création, dans ce qu’elle a de plus précieux : sa diversité, son audace, sa capacité à unir et à penser un monde commun en pleine mutation.
Nous savons que l’histoire ne s’écrit ni avec des bilans comptables, ni avec des indicateurs de performance carbones. Elle s’écrit avec des œuvres, des voix, des gestes, elle doit continuer d’être portée avec une volonté de conjuguer encore les verbes de nos métiers au futur.
le bureau de l’Union des Scénographes
L’UDS invite les professionnels et le public à rejoindre massivement les initiatives suivantes et à en inventer d’autres :
– 5 JUILLET 18H30 – Rassemblement contre les coupes budgétaires devant la Mairie d’Avignon
– 6 JUILLET 16H30 – Meeting unitaire pour un service public de la culture , Cloitre saint Louis
– 8 JUILLET 19H – Concert pour le service public de la culture / organisé par les artistes permanents de l’orchestre d’Avignon (avec des musiciennes et musiciens, enseignants et enseignantes artistiques de Lille , Toulouse, Marseille…)
– 13 JUILLET 19H – Culture Boum Boum, avec Planète Boum Boum à la manœuvre et la présence de HK et les Saltimbanks !
